15 décembre 2020 au 06 février 2021
« L’endroit de l’art me paraît être le lieu possible de la plus grande infinité de croisements sans conséquence dramatique. »
Cette déclaration de Jean-Marc Andrieu devient évidente en contemplant son atelier, espace vitré sur deux niveaux ouverts sur la cour, elle-même lieu d’acclimatation d’espèces végétales importées de ses voyages.
Tout, dans cet espace, concourt à l’accueil des êtres et des choses, du vivant et de l’inanimé : morceaux de bois ou de métal, sangles, pneus de bicyclette, pièces de monnaie etc. On pourrait parler d’emmagasinage en observant cette collecte à la fois rustique et sophistiquée. Les objets, une fois adoptés, attendent leur heure, pour participer à des associations fortuites qui deviendront un dessin ou une sculpture. « C’est le geste qui adapte les matériaux aux circonstances et déduit les circonstances des matériaux. » comme il le dit lui-même dans le Petit lexique des matériaux, moyens et thématiques. Quand on tente de comprendre comment le jeu des correspondances opère, Jean-Marc Andrieu répond : « Ce qui me paraît caractériser mon travail, c’est la tentative de positiver un défaut de méthode qui, partant du constat d’une incapacité atavique à la mise en ordre, va chercher la béquille d’un système non-linéaire, mais un système de l’action propre à réaliser la somme de toutes les digressions. » Le goût des mots, le sens qu’il leur donne – parfois inverse du sens commun – participe à l’élaboration des œuvres, confrontant signes et lignes sur un même plan, avec la même jubilation. Le rapport au temps est aussi une composante essentielle du travail de Jean-Marc Andrieu : les œuvres, qu’elles soient sculptures ou dessins, ne sont pas fixées une fois pour toutes dans un état définitif ; au contraire, elles sont susceptibles d’être reprises dans un questionnement permanent.
« Ils (les dessins) sont quelquefois retravaillés avec des années ou dizaines d’année d’intervalle, et peuvent s’appareiller fortuitement pour se soutenir et se conforter dans l’aphasie que je leur prête. » Le travail de Jean-Marc Andrieu est irréductible aux genres et aux définitions, mais aussi aux dates. S’il partage quelques affinités avec certains artistes de la génération précédente, qu’il cite quelquefois respectueusement et affectueusement, il pratique un matérialisme plus poétique que dialectique. Il a organisé sa propre évasion, gagné sa liberté en construisant une identité si singulière qu’à des années d’intervalles et quel que soit le support emprunté, une œuvre de Jean-Marc Andrieu n’est identifiable qu’à elle-même.
*Si tu vas bien, alors moi aussi je vais bien.