François Lagarde

Depuis 1973, François Lagarde réalise des portraits d’écrivains, de poètes, de philosophes et d’artistes en Europe et aux Etats-Unis. Ses photographies cherchent moins à incarner un nom souvent connu qu’à porter, à travers un visage, une posture, un détail du vêtement ou du mobilier, un regard sur l’oeuvre, sur les « significations » qui la rattachent à une existence. S’il y a quelque chose de « philosophique » dans ces photographies, ce n’est pas parce que les philosophes en sont une cible privilégiée mais par leur enjeu qui est de dévoiler et de questionner. Enjeu qui est aussi celui des artistes dont il a été si proche.

« Très vite me vinrent quelques certitudes : j'étais convaincu que la photo était un acte féminin. Je recevais comme l'appareil, vers l'intérieur, la personne et sa lumière. C'était tout l'inverse d'un tir. Faire un portrait était un acte fort, troublant, qui peut aller au fond de l'être, mais pour se révéler il nécessite le retrait. Avec mon éducation calviniste, je n'eus sur ce point que peu d'efforts à faire ! J'aimais la photo par-dessus tout pour son espace désacralisé où l'unique était chassé. Cette présence mécanique a une incidence énorme dans la relation aux autres. Aujourd'hui, elle a muté en électronique pour se coller à chacun. Téléphone portable, appareil de photos, caméra, ordinateur tissent désormais notre relation pacifique au monde avec un petit air de mobilisation totale. C'est devenu l'expérience obligée de chacun ».1

« Il y a un point qui m'agite et m'a toujours agité en photographie comme dans toutes les techniques que j'ai utilisées et bien-sûr avec le numérique. J'ai un amour pour ce qui est net. J'aime la représentation quand sa netteté l'extrait de toute équivoque. J'aime quand on ne voit pas plus que ce qu'on voit. Je ne supporte pas les représentations qui laissent supposer plusieurs directions. À partir de cette netteté je pense que l'on peut travailler, sortir de la projection de soi, sortir du faux discours d'une liberté de choix dans le flou et être plus attentif à la vision que l'autre nous offre ».2

Ainsi, sa démarche mue par une rencontre est le résultat d’un questionnement sur le sujet, la relation à l’autre et le perfectionnement technique.

1 François Lagarde, in Brion Gysin sans légendes, "Le Refuge", cipm/Spectres Familiers, 2013

2 François Lagarde, extraits d'un entretien avec Didier Morin, paru dans la revue Mettray, septembre 2012

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